LES ENJEUX POLITIQUES ET SOCIAUX DE L’ÉDUCATION POPULAIRE :

 

Accomplir une transformation sociale

5Face à l’inégalité d’accès à l’instruction et à l’éducation, l’éducation populaire cultive une perspective de changement social qui tendrait à réduire les inégalités dans les domaines sociaux, économiques et culturels.

6Les individus doivent pouvoir s’approprier les moyens nécessaires, ceux de la « culture », qui vont leur permettre de devenir des citoyens et d’accéder à une prise de conscience individuelle et collective, à un échange d’idées mobilisatrices pour provoquer ce changement.

7La citoyenneté, précisément, a été une constante dans l’histoire de l’éducation populaire. Mais, dans la période récente, son exercice est de plus en plus difficile. L’univers politique est souvent désavoué faute d’emprise suffisante sur le réel. Il s’agirait donc de raviver la notion même de citoyenneté, de plus en plus démobilisée par la société de consommation et par l’information de masse de mauvaise qualité, pour que les plus défavorisés puissent devenir porteurs de projets et donc acteurs démocratiques, eux qui ont le sentiment de n’avoir aucune possibilité d’agir sur le monde ni même sur leur propre destinée. Il y a donc là un enjeu de transformation sociale considérable pour l’éducation populaire.

Atteindre un public populaire

8Implicitement, l’éducation populaire entend cibler la partie du peuple la moins instruite, la moins cultivée ou éduquée. Or historiquement, elle n’a pas atteint ce public-là, au dire même des différents responsables associatifs.

9Ces derniers, qui ont à l’esprit le sens du bien commun et de l’intérêt collectif, cherchent une mise à disposition de tous des savoirs et connaissances. Mais il est difficile d’y arriver avec les classes réellement populaires. Il ne suffit pas de souhaiter ou de déclarer s’adresser à elles. La question des non atteints ou des prétendus « non atteignables » reste massive.

10Une autre question se pose, celle de savoir quelle culture doit véhiculer l’éducation populaire. S’agit-il de faire accéder le peuple aux corpus scolaires reconnus, à un savoir dont il a été tenu à l’écart, dont il n’est pas forcément demandeur, mais dont on estime qu’il lui serait nécessaire ? Ou bien s’agit-il de valoriser sa propre culture et d’en dégager le sens, à ses propres yeux mais aussi pour le reste du corps social ?

11Il y aurait donc la culture savante ou lettrée et la culture du peuple. Mais ne peut-on envisager également une troisième voie qui mettrait au jour une culture partagée, empruntant aux deux précédentes pour aboutir à une nouvelle forme culturelle, à un renouvellement de la pensée et de l’action ?

Affirmer la démocratie

12Aujourd’hui, les responsables des associations d’éducation populaire visent une prise de conscience active des évolutions et des complexités de la condition humaine, une possibilité de re- créer du lien social et d’ouvrir des perspectives. L’éducation populaire a le rôle de faire redécouvrir à l’individu son pouvoir d’action, avec d’autres et grâce aux autres, sur lui-même, sur son histoire et son environnement. Cette interpellation peut se faire dans la liberté car l’éducation populaire a la grande chance et la grande force de pouvoir définir librement ses choix, ses objectifs, ses finalités, ses méthodes.

13L’éducation populaire dispense donc des savoirs qui permettent à chacun de se les approprier, de devenir davantage capable de dialoguer avec d’autres, d’analyser les situations auxquelles il est confronté et de rentrer dans le jeu démocratique.

14De nombreuses associations engagées dans des quartiers très défavorisés opèrent des médiations là où les autorités publiques sont largement impuissantes. Se pose alors pour elles la question de savoir comment agir : en tant qu’agents de normalisation ou en tant qu’éveilleurs de conscience ?

15Les Universités populaires sont un outil privilégié de l’éducation populaire. Nous allons évoquer des exemples à travers l’histoire pour affiner la réflexion sur ces enjeux.